De plus en plus de projets digitaux prennent en compte de multiples facteurs liés à la réglementation, aux enjeux de l’entreprise ou encore aux contraintes techniques. Le designer doit s’inscrire dans cet écosystème et non comme un électron libre.

Donne-moi tes contraintes, je te dirai quel design faire !

La meilleure solution pour appréhender ces contraintes, qui vont inéluctablement avoir une influence sur le design, est de les prendre en compte dès le début du projet. Aussi frustrantes qu’elles soient pour le designer, cela permet néanmoins de garantir la réussite d’un projet. Cela évite également d’avoir un design décorrélé des solutions techniques envisagées.

Mais encore faut-il savoir les identifier et ne pas se mettre des œillères face à un “enthousiasme créatif”. Le designer doit évidemment être force de proposition et défendre ses créations, mais également faire preuve d’adaptabilité.

Voici une liste des contraintes les plus communément identifiées sur nos projets de design numérique.

Les frameworks front-end

La liste des nouvelles techno front-end est longue : Angular, React, VueJS, React Native, Xamarin, Flutter,… et est en constante évolution. Ces choix de technologies sont souvent décidés par les responsables techniques / architectes des projets qui, eux aussi, font leur choix en fonction de contraintes (legacy, base de données, sécurité, performance, typologie d’application…).

Même si elles n’entraînent pas des limitations trop importantes au niveau des fonctionnalités et apparences graphiques, il se peut que parfois, pour des raisons de temps et d’argent, l’équipe de développement décide de passer avec un Framework de composants et patterns déjà disponibles (ex : PrimeNG avec Angular).

Il est ainsi primordial de discuter le plus tôt possible avec les équipes techniques pour connaître en amont du projet, les choix techniques réalisés. Une fois les besoins fonctionnels identifiés et priorisés, la validation auprès du client et des équipes techniques permet d’avancer sans mauvaise surprise sur le design d’interaction et d’interface.

Pour voir son travail intégré et respecté jusqu’à la livraison, le designer devra avoir en tête la bibliothèque de composants, les librairies à utiliser pour proposer un design mais réaliste au regard du framework utilisé.

À lire à ce sujet : Étude de cas de Bérénice

L’accessibilité

L’accessibilité ne devrait pas être vue comme une contrainte mais comme une composante obligatoire sur les projets.

Pour rappel, les services publics numériques et certains services privés ont l’obligation d’être accessibles de façon équivalente à tout citoyen, qu’il soit ou non en situation de handicap (visuel, auditif, moteur, trouble dys…). Le référentiel à suivre en matière d’obligations d’accessibilité est le Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité (RGAA).

Pour de nombreux designers, l’accessibilité rime souvent avec limitation voire absence de créativité. Cependant, une fois comprises et assimilées, les recommandations liées à l’accessibilité permettent de créer des interfaces élégantes ET utilisables par tous.

Plus tôt les règles d’accessibilité sont intégrées au projet, plus tôt les choix des couleurs, typographies, iconographies, composants seront compatibles avec le RGAA, sans pour autant restreindre les aspects graphiques.

Par exemple, savoir que la couleur de la typographie ne crée pas un contraste suffisant avec l’arrière-plan pour être lue vous incitera à trouver une autre composition. En ne prenant pas en compte les critères d’accessibilité dès le début du projet, le risque est de partir dans une création inaccessible, se rendre compte en fin de projet que cela ne fonctionne pas et devoir tout modifier. À la place d’avoir, dès le départ, une composition graphique adaptée, vous aurez une composition graphique détournée qui ne fonctionne plus.

Pour creuser le sujet, lisez notre article : Pensez Accessibilité !

Les enjeux business

Créer des produits et services qui répondent aux besoins et attentes utilisateurs est évidemment clé lorsqu’on parle d’UX Design. Néanmoins, ces nouvelles solutions doivent aussi trouver leur marché et apporter du revenu aux entreprises qui les conçoivent.

C’est ainsi qu’en fonction des modèles économiques, l’entreprise, porteuse du projet, va vouloir inciter les utilisateurs à s’abonner à des offres premium, vendre des produits et services additionnels, afficher des temps de publicité… autant d’éléments qui vont venir ‘perturber’ l’utilisateur dans son expérience du service.

Il est ainsi important pour le designer de comprendre le modèle économique de l’entreprise et d’intégrer les attentes business dès la conception. L’enjeu étant de faire en sorte que ces sollicitations soient les moins intrusives possibles et réduire au mieux le sentiment d’agression commerciale.

L’identité de marque

Designer à partir d’une charte graphique ou d’un Design System existant peut également paraître comme une contrainte à la créativité. Néanmoins, comme le souligne Jean-Noël Kapferer, sociologue spécialiste de la communication : “Plus l’identité de marque est stable dans le temps et plus la marque est forte et valorisée”.

Le choix de la rupture graphique peut évidemment s’envisager mais pour des raisons objectives et justifiables. Par exemple, lorsqu’une entreprise crée une nouvelle gamme produit, avec l’objectif de moderniser son image de marque, la création d’une marque fille qui chapeautera la solution digitale est un critère pertinent pour s’écarter des marqueurs graphiques de l’entreprise.

Dans d’autres cas, il est nécessaire que le designer capitalise sur l’histoire et les attributs de la marque (sa personnalité, son physique, sa culture… ), au dépend de son désir de création afin de réaliser un travail de cohérence avec l’image de marque.

La sécurité

Les contraintes de sécurité peuvent entraver l’expérience utilisateur notamment lors des phases d’authentification, de la création de compte ou encore de paiement. Ces contraintes sont souvent dictées par la technique, les choix des services Cloud, les confidentialités des données partagées…

Des discussions avec les équipes de développement et les services IT en charge de la sécurité sont, de la même manière, primordiales pour arriver à mieux comprendre les impacts sur le parcours utilisateur et faire en sorte que cela soit le moins contraignant possible pour les utilisateurs finaux.

Le fait de l’anticiper dès le départ vous permettra de proposer des parcours plus fluides, de diminuer les craintes utilisateurs en jouant avec le design émotionnel et du contenu rédactionnel rassurant et explicatif (tout en étant RGPD friendly).

Conclusion

Vous l’aurez compris, les contraintes font partie du quotidien du designer. Plus tôt elles seront identifiées et qualifiées, plus le projet aura des chances de voir le jour avec un design réfléchi et abouti.

Évidemment, les plus grosses contraintes sur lesquelles il vous sera le plus compliqué d’agir restent le temps et l’argent disponibles sur le projet et qui demandent parfois le plus de compromis.

Photo by Gwendal Cottin on Unsplash